Thaïlande : Pattaya veut se refaire une virginité


La junte militaire au pouvoir en Thaïlande aimerait bien nettoyer les trottoirs de Pattaya, auto-proclamée capitale du vice. Depuis l’appel du 1er ministre, le général Prayut Chan-o-cha, à « déraciner l’industrie du sexe à Pattaya », on ne compte plus les raids lancés par la police dans les clubs et les salons de massages locaux.

Mais les autorités doivent lutter contre des freins très puissants tels la volonté des filles et des ladyboys (travestis) à continuer à gagner leur vie en se prostituant ¨mais également le poids économique de cette « industrie » devenue majeure grâce au flot de clients étrangers qui n’est pour l’instant pas en voie de se tarir.

La station balnéaire internationalement connue, située dans la province de Chonburi, sur la baie de Bangkok dans le golfe de Thaïlande, à 147 km au sud-est de la capitale Bangkok, a vu son destin basculer dans les années 1960 quand les militaires américains ont commencé à y affluer pour tenter d’oublier les horreurs de la Guerre du Vietnam.

Au moment du départ des derniers contingents américains en 1976, le secteur privé avait déjà assuré la pérennité de l’activité grâce principalement au tourisme sexuel.

Aujourd’hui, on estime à environ 27 000 travailleurs du sexe à Pattaya (sur 140.000 prostituées en Thaïlande) qui peuvent espérer gagner entre 70.000 et 150.000 bahts (1.900 à 4.100 euros) par mois, soit dix fois le salaire moyen en Thaïlande.

La plupart des prostituées se trouvent sur la Walking Street, une bande de deux kilomètres bordée de go-go bars et de lieux de plaisir.

Moraliser la ville

Avec notamment la nomination de la première femme ministre du tourisme, Kobkarn Wattanavrangkul (photo), laquelle a promis d’en finir avec les ladyboys, go-go danseurs et spectacles de ping-pong (sexe), c’est le retentissement dans la presse internationale de plusieurs affaires criminelles, notamment des meurtres de touristes étrangers, qui ont poussé les autorités à prendre des mesures radicales.

Le lieutenant-colonel Sulasak Kalokwilas, avec le colonel de police Apichai Kroppeth, fait partie de ces officiers aujourd’hui investis d’une mission impossible : éradiquer la prostitution, nettoyer la ville et la rendre sécuritaire pour les touristes.

Mais pour les habitants de la ville, la campagne des autorités suit un schéma bien connu. Beaucoup de bruit pour rien avec une répression toujours limitée car on ne s’attaque pas ainsi à un secteur économique qui rapporte autant.

Pour les filles, les patrons des bars et des salons de massage, les taxis, les mafias locales et, disent certains, pour des policiers pourtant chargés de lutter contre elle.

La prostitution « génère des sommes d’argent énormes et ne pourrait exister sans la connivence de la police« , affirme le journaliste britannique Andrew Drummond, qui a couvert les faits divers en Thaïlande pendant 20 ans.

Des accusations démenties par le colonel Apichai qui affirme que ses hommes ne touchent « évidemment pas de pots-de-vin« .

12 millions de touristes en 2016

La prostitution est bien sûr illégale en Thaïlande. Mais les patrons de bar contournent la loi en n’employant officiellement les filles que pour occuper les clients et discuter avec eux, touchant une commission de l’ordre de 500 bahts (13 euros) chaque fois qu’un client souhaite quitter le bar avec cette « employée ». Et ce qui se passe ensuite pendant ce moment « privé », officiellement, ne regarde que ces deux derniers.

En 2016, 12 millions de touristes -dont 70 % d’étrangers- ont visité cette ville aux 2.000 hôtels qui offre plus de 100.000 chambres, une ville principalement constituée de deux avenues parallèles (Beach Road et Second Road) liées entre elles par des rues perpendiculaires (appelées soi) à l’activité frénétique.

Le quartier de Jomtien, secteur sud de Pattaya, est plus calme et la mer y est plus propre. Les îles autour de Pattaya attirent également les touristes, notamment Koh Larn, célèbre pour son récif et ses activités nautiques.





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