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Pourquoi Air France/KLM a réussi en 2015 ?

Bonne nouvelle que l’on attendait depuis plusieurs années : le Groupe Air France / KLM a publié des résultats positifs pour l’exercice 2015. Ne boudons pas notre plaisir, même si les dirigeants ont longuement appuyé sur le fait que cela ne représentait pas la fin des efforts à fournir, loin de là. Et ils ont raison.

baroux-1 [1]La lecture attentive des publications illustre bien en effet ces précautions. Qu’y voit-on ?

D’abord un chiffre global d’affaires en hausse de 4,5 % à 26,062 milliards d’€ ce qui n’est au fond pas si mal et un résultat courant d’exploitation de 816 millions d’€ contre une perte de 129 millions d’€ en 2014.

Lorsque toutes les activités opérationnelles sont prises en compte y compris l’intégration de la quelque centaine de filiales plus ou moins importantes, le résultat ressort à plus d’un milliard d’€ : 1.115 millions € contre 751 millions en 2014. Cela représente tout de même une progression de 48 % du résultat opérationnel.

Voilà pour les aspects positifs et ils ne sont pas négligeables, d’autant plus que l’impact de la baisse du prix du pétrole a été finalement assez faible : le coût du carburant est passé de 6.629 millions d’€ en 2014 à 6.183 millions d’€ en 2015 soit une baisse de 6,7% représentant tout de même 446 millions d’€.

Mais il reste encore beaucoup à faire comme l’ont souligné Alexandre de Juniac et Frédéric Gagey les PDG du Groupe et d’Air France. Car il reste deux points noirs si la compagnie veut se donner les moyens d’assurer son développement à long terme.

D’abord les frais de personnel. En dépit des nombreux plans de départ volontaires qui ont coûté très cher dans le passé et qui représentent encore une charge de 160 millions en fin d’exercice, sans compter les énormes dégâts faits sur l’image d’Air France, la charge constatée est encore de 7.852 millions d’€ contre 7.636 millions d’€ en 2014 soit une augmentation de 2,8 % à 216 millions d’€.

Cela est d’autant plus curieux que dans le même temps les effectifs ont baissé de 1.430 salariés pour s’établir à 96.417 employés. Finalement les gains en nombre sont effacés par les augmentations de salaires.

Et puis le coût de l’endettement. Il s’établit à 915 millions d’€ qui viennent plomber les résultats opérationnels. Sur ce montant 310 millions vont uniquement au remboursement des intérêts des emprunts. Rappelons que pour remonter les capitaux propres en positif, ce que la compagnie était obligée de faire, cette dernière a du lever des Obligations Perpétuelles dans le courant du moins d’avril 2015, pour un montant de 600 millions d’€ qu’il a fallu payer très cher : 6,5 % par an.
Rien que pour ce poste, Air France a déboursé une première tranche d’intérêts de 17 millions d’€ en octobre.

Cette levée et la vente de 2,2 % d’Amadeus qui a rapporté 218 millions d’€ ainsi que la cession de 6 paires de slots que le groupe détenait à Londres Heathrow à Delta Air Lines pour une plus-value de 230 millions d’€, ont permis de faire passer les capitaux propres négatifs en 2014 à hauteur de 692 millions d’€ à un montant positif de 273 millions d’€.

Que faut-il retenir de cette avalanche de chiffres ?

D’abord que les dirigeants ont bien raison de ne pas crier victoire. Les efforts entamés restent à poursuivre encore pendant de longues années. Le Groupe doit faire aussi bien qu’au moins ses concurrents européens. Alors qu’Air France/KLM a un résultat d’exploitation courant de 3,13 % de son chiffre d’affaires, celui de Lufthansa est plus du double et celui du groupe IAG est au-dessus de 10 %.
Il est par conséquent urgent d’arriver à ces niveaux ce qui aura un double effet : d’abord permettre un désendettement qui pèse trop lourd sur les charges du Groupe et de donner des marges pour la modernisation de son outil de production, en clair les appareils.

Les concurrents sont en train de se doter des nouveaux modèles des Dreamliners et 737 Max chez Boeing et les A 380, A350 et A320 Neo chez Airbus. Pour se maintenir dans le peloton de tête du transport aérien, il faut à l’évidence se ré-équiper. Or, contraint et forcé le groupe AF/KL n’a passé que très peu d’ordres au cours de l’exercice.

Comme le disait Jean Pierre Raffarin, « la route est droite, mais la pente est dure ». Le redressement d’Air France/KLM n’est qu’à son début.

Jean-Louis BAROUX