Les touristes vont-ils arriver à faire couler Venise ?
14 mai 2019 Serge Fabre Aucun commentaire À la une Luigi Brugnaro, Sur tourisme, venetie, Venise 7071 vues
Venise ne fait pas face à une marée montante, mais à deux : la première est l’eau qui ronge les fondations de la Sérénissime et les grands navires qui accostent encore à deux pas des monuments historiques. La deuxième est le flux trop important de touristes. On compterait au moins 25 millions de touristes chaque année. Les autorités italiennes (populistes) ont quand à elles trouvé un petit moyen…
Venise s’enfonce inexorablement
Venise est confrontée à la montée des eaux depuis son origine.
Construite vers la fin du VIe siècle sur une centaine d’îlots reliés par un dédale de canaux, la Sérénissime est habituée aux inondations liées aux fortes marées. Entre 2000 et 2010, la place Saint-Marc s’est retrouvée plus de 50 fois sous plus de 1,10 mètre d’eau.
Malgré de nombreux travaux, la lagune continue de s’enfoncer. Les prévisions anticipent un enfoncement de 8 cm au cours des vingt prochaines années, selon des scientifiques italiens et français. Le réchauffement climatique serait également responsable.
Le problème des croisières n’est pas réglé
Le gouvernement italien avait annoncé, en 2017, l’interdiction des navires de croisière dans le centre historique de Venise après une campagne menée de longue date pour les empêcher d’entrer dans le célèbre Grand Canal. Cependant, il faudra au moins quatre ans pour mettre en œuvre les changements, ce qui verra les navires pesant 100 000 tonnes ou plus redirigés vers la ville industrielle voisine de Marghera.
Les militants écologistes se sont battus pour que les bateaux de croisière soient complètement bannis de la lagune de Venise, et pas seulement du centre-ville, et cette annonce est bien en deçà de cette réalité.
En attendant, les vagues créées par les passages incessants des bateaux provoquent des fissures dans les fondations. L’eau détériore des pans entiers de murs qui s’effondrent. Il y a au moins 4 ans ans déjà, les dégâts étaient visibles sur certains palais.
Les italiens sont entre protection du patrimoine et l’économie
Les Nations Unies ont émis un avertissement pour des actions concrètes soient menées car pour le moment, Venise fait partie du patrimoine menacé de l’UNESCO. Il faudra attendre pour que les navires n’arrivent plus proche de la place St Marc (ils rapportent de l’argent). Il faudra attendre également des actions concrètes pour les logements loués aux touristes (cela sert les intérêts des riches vénitiens). La municipalité de Venise a trouvé sa solution … faire payer un droit d’entrée aux touristes ! Cette taxe va s’ajouter à la taxe de séjour payée par les clients séjournant dans les hôtels.
Une taxe qui ne servira qu’à payer le nettoyage de Venise
Le maire de Venise (et entrepreneur), Luigi Brugnaro, a présenté le projet de la ville concernant une nouvelle taxe, qui, espère-t-il, ouvrira la voie à un avenir plus durable. L’utilisation principale de cette taxe, qui devrait rapporter 3 millions d’euros la première année, consistera dans un premier temps à préserver la propreté de la ville. Nous sommes bien loin de la protection réelle de la cité lacustre.
Quel est le prix du péage à touristes ?
Les visiteurs seront facturés provisoirement de trois euros par jour en basse saison et 10 euros en haute saison. Le mouvement a été approuvé par le gouvernement populiste… comme un moyen de récupérer les coûts de nettoyage des dégâts et des déchets laissés par 24 millions de touristes par an, dont beaucoup arrivent en excursion d’une journée et contribuent peu à l’économie de la ville.
Il faut bien dire que ce n’est pas une taxe qui arrêtera touristes
Le problème n’est pas le nombre de touristes en soi, mais leur désir de voir les mêmes choses, au même moment, de la même manière: cela produit des goulots d’étranglement spectaculaires dans un nombre restreint de lieux dont Venise, Barcelone, Amsterdam, Dubrovnik… La France tente de faire connaitre ses provinces. La Thaïlande va commencer une campagne afin de faire mieux connaître de superbes provinces encore peu fréquentées. Les touristes ne se dirigent pas encore vers toutes ces destinations peu connues.
Dans une moindre mesure, laquotidienne.fr s’efforce de dénicher des destinations qui sont en devenir.
Serge Fabre
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