L’avenir de la construction aéronautique : sombre ou radieux ?


Décidemment il semble que la récente et épouvantable crise que nous n’avons pas encore fini de traverser n’a pas appris grand-chose aux acteurs du transport aérien. La course aux volumes est répartie et pourtant ce ne sont pas les avertissements qui manquent.

Dans le secteur de la construction aéronautique Airbus fait la course en tête depuis que Boeing n’arrête pas d’éponger les dégâts causés par sa stratégie passée. Il faut tout de même rappeler que les défauts du Boeing 737 MAX ont été causés par la pression mise sur les équipes de certification par les dirigeants du constructeur. Il était de la plus grande importance de ne pas se laisser distancer par le concurrent européen lequel avait pris une longueur d’avance avec la gamme NEO.

On s’aperçoit d’ailleurs que les autres modèles de Boeing ont été également impactés. Les défauts, certes mineurs, dans la fabrication des B 787 et de la nouvelle gamme des B 777 sont aussi une conséquence de l’urgence dans laquelle il faut sortir les appareils.

Alors on a construit des avions à cadence accélérée. Près de 200 appareils d’une capacité supérieure à 100 sièges sortaient par mois. En fin d’année 2019 près de 30.000 avions étaient en exploitation. Et puis la catastrophe est arrivée, et la moitié des appareils ont été cloués au sol. On ne mesure pas encore l’ampleur des dégâts.

Toute la chaine est touchée, depuis les constructeurs jusqu’aux distributeurs, en passant par les transporteurs, les aéroports, les motoristes, les fournisseurs de services.

Chaque avion coûte en moyenne 100 millions de dollars. Ce chiffre inclut même les plus petits modules. Le secteur le plus en danger est sans conteste celui des sociétés de leasing car ce sont elles qui supportent la charge des amortissements, et celle-ci ne peut être compensée que par la location des machines.

Or les opérateurs ne sont plus en capacité d’opérer toute leur flotte, tant s’en faut et ils tentent par tous les moyens de repousser les échéances des loyers.

Sur cette crise majeure dont on peut espérer qu’elle aura maintenant une fin rapide avec l’extension de la vaccination et peut-être l’harmonisation des protocoles sanitaires, vient se greffer un autre danger à plus long terme pour le transport aérien : le diktat écologique. Il est devenu le symbole de la destruction de la planète. C’est une cible facile, très identifiable, qui permet des illustrations impressionnantes et surtout qui ne sait pas se défendre.

On verra certainement des initiatives brutales contre le transport aérien, prises maintenant par les gouvernements pour des raisons essentiellement électorales.

Dans ces conditions on pourrait penser qu’avec la remise en service des milliers d’avions pour le
moment cloués au sol et qui sont néanmoins en parfait état de marche et de la pression écologique dont le but est de ralentir la consommation de déplacements aériens, les constructeurs se trouveraient dans l’obligation de réduire considérablement leurs chaines de production. Très curieusement, il n’en est rien.

Airbus vient d’annoncer une prévision de production jamais atteinte, jusqu’à produire à l’horizon 2025, ce qui est demain jusqu’à 75 appareils de la série 320 par mois. Il n’est d’ailleurs pas douteux que Boeing, une fois réglées les questions de certification à la fois des avions et des chaines de production, va prendre les dispositions nécessaires pour rejoindre la production du constructeur européen.

Alors que va-t-on faire de tous ces appareils ? Jusqu’au début des années 1980, la durée de vie d’un avion commercial était de l’ordre de 15 ans. Avec l’arrivée des nouvelles méthodes de construction basées sur de nouveaux matériaux plus résistants, plus performants et plus légers, la durée de vie des avions et progressivement passée au-delà de 30 ans.

Même si le transport aérien reprend sa course en avant, une fois revenu au niveau historique de 2019, comment absorber les nouveaux modèles sortis des chaines, lesquels apporteront sans doute de nombreuses améliorations par rapport aux appareils actuels ?

Faudra-t-il pour cela se résoudre à détruire les avions actuels qui peuvent encore servir pendant des années ? Ou est-ce que les constructeurs anticipent une demande d’avions encore plus importante que celle que nous avons connue ces dernières années ?

Mais alors comment faire accepter au public et aux gouvernants la croissance d’un secteur actuellement la cause de tous les maux de la planète ?

Pour réussir le challenge il faudra une communication puissante, persuasive et coordonnée entre tous les acteurs. C’est un enjeu majeur et il n’est pas gagné.

Jean-Louis Baroux





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