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Grève AF : les vraies raisons de la colère

Les pilotes de la compagnie Air France ont entamé un mouvement de grève le lundi 15 septembre dernier.
Il s’agit du mouvement le plus important depuis 1998.

Jean-Louis Barber, pilote et président du syndicat SNPL AF Alpa fait le point sur les raisons de ce mécontentement :

« Ce genre d’évènement n’est jamais décidé et ni entrepris à la légère ou de gaieté de cœur.
Ce mouvement répond aux provocations sans précédent du Président Alexandre de Juniac vis à vis des pilotes de ligne d’Air France et plus généralement de tous les salariés de l’entreprise.
La détermination des pilotes est si forte que cette grève est suivie par quatre pilotes sur cinq« .

LQ : Que reprochez-vous à la direction d’Air France ?

JLB : Sur la forme, le choix du Président d’Air France/KLM de ne pas respecter les accords en vigueur, d’afficher un mépris vis à vis de l’ensemble des salariés en considérant qu’ils ne comprennent pas les enjeux, de fixer les points de sortie « non négociables », pose les bases d’un dialogue social d’un autre âge.

Sur le fond, et en dépit des mensonges de la direction de la compagnie, le projet de création de Transavia Europe constitue bel et bien une délocalisation des emplois de pilotes vers des états membres moins disant socialement.
Quant au développement annoncé de Transavia France, il s’agit ni plus ni moins d’une externalisation et d’un transfert de l’activité d’Air France.

En outre, la direction d’Air France annonce être prête à investir dans un premier temps un milliard d’euros et provisionne un autre milliard pour mener ce projet, ceci alors même que la capitalisation boursière de l’entreprise est d’environ deux milliards et demi d’euros.

Il ne fait désormais aucun doute que les efforts entrepris depuis deux ans, à hauteur de 20 % de la masse salariale, par les salariés d’Air France dans le cadre de Transform2015 – efforts consentis pour améliorer les comptes de l’entreprise, réduire son endettement et permettre le retour à la croissance – servent aujourd’hui à la direction pour le financement d’un projet qui vise à la délocalisation de leurs emplois.

LQ : Quelles conséquences selon vous cela peut-il avoir ?

Par-delà cette dangereuse spirale, se profile à très court terme une baisse des ressources fiscales et sociales de notre pays, l’activité économique des bases européennes de Transavia Europe échappant aux cotisations françaises.

Citons notamment un risque potentiel d’explosion de la Caisse de Retraite du Personnel Navigant de l’Aviation Civile.
A l’évidence, cette situation pose la question plus globale des charges qui pèsent en France sur le travail d’une manière générale et sur le Transport Aérien en particulier. Face à cette difficulté, les dirigeants d’entreprise cherchent à réduire les écarts de compétitivité en agissant, dans le meilleur des cas, sur la qualité des contrats
français et, dans le pire, en les délocalisant.

LQ : Le mouvement peut-il s’étendre ?

JLB : En interne, les explications que nous parvenons à donner aux salariés du Groupe Air France amènent aujourd’hui les pilotes néerlandais du Groupe Air France KLM, légitimement inquiets de la tournure prise par les évènements, à soutenir notre mouvement. Les hôtesses et les stewards viennent d’écrire au Premier Ministre pour lui faire part de leur menace de déposer également un préavis de grève. D’autres organisations syndicales pourraient bien leur emboîter le pas.

Au-delà des questions inhérentes au seul Groupe Air France, nos collègues allemands de la Lufthansa sont engagés dans un conflit similaire. La différence entre nos deux pays demeure que les pilotes allemands ont été en capacité de lever leur préavis, la direction de la Lufthansa semblant prête à reprendre les discussions.