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Des assises du Tourisme enfin pragmatiques ?

Christian-Orofino [1]Dans la chronologie de l’organisation des Assises organisées par Sylvia Pinel, Ministre du Tourisme, le premier acte a été la consultation en ligne au niveau national et international qui s’est déroulé du 26 novembre au 10 février.

Il est prévu dans le dispositif de ces Assises que les participants à cette consultation seront informés personnellement des mesures qui seront prises.

En effet, uniquement sur le plan national, il y a eu 2 690 réponses.

Le nombre de ces participants est encore plus important sur le plan international dont l’analyse fera l’objet d’une chronique différente.

A ces 2 690 participants en ligne viennent s’ajouter les groupes de travail centraux et régionaux qui réunissent près de 10.000 acteurs à Paris et dans les 27 régions.

C’est donc sur le plan national près de 13.000 intervenants qui ont soit émis des propositions en ligne, soit ont travaillé sur ces propositions au cours de diverses réunions physiques.

Sur les 2 690 participants à cette consultation en ligne, près de la moitié (53 %) sont des professionnels du tourisme dont :

– 23 % sont des professionnels institutionnels CRT, CDT, OT
– 77 % sont des professionnels du secteur privé.

Détail qui revêt une importance majeure, dans la mesure où le tourisme national, du moins en ce qui concerne la promotion, est actuellement sous la quasi dépendance des organismes publics.

Toutes les catégories des professionnels privés se sont exprimées, bien sûr en grande majorité les hôteliers, mais aussi les Tours Opérateurs, les guides, les Chambres de Commerce.

Cette forte participation du secteur privé indique une attente importante du secteur commercial.

La prise en compte de cette mobilisation des entreprises commerciales doit se traduire par des mesures qui transforment et privilégient définitivement le tourisme actuel vers une industrie de résultats telle que l’induit la notion de « cause nationale ».

Une diversification de l’offre

Sur le fond, les propositions majoritaires qu’ont exprimées les participants correspondent aux 5 catégories de questions de cette consultation en ligne proposée par le Ministère.

Ainsi afin de rendre notre tourisme plus attractif, plus authentique et moins « muséeux », la promotion des territoires et de leur spécificité a été largement plébiscitée par participants avec la mise en place d’offres comme l’oenotourisme, la gastronomie, la randonnée etc…

Cette gamme de produits, si elle constitue l’axe principal du renouveau de la vitrine du Tourisme français, ne s’improvise pas car l’authenticité ne peut pas se contenter d’une démarche uniquement marketing.

Dans la plupart des régions, ces produits thématiques existent déjà, mais ceux qui les ont conçus ont besoin d’une promotion à l’international qui demande des moyens que la taille de leur entreprise ne leur permet pas.

Il serait intéressant dans ce domaine de faire l’inventaire de ces offres, car dans un site de commercialisation de la marque France, l’offre doit être organisée en fonction de deux types de clientèle : celle qui recherche une approche classique de son séjour : les Pyramides, le Taj Mahal , le Parthénon, le Louvre etc.. et fait correspondre une logistique de transport et d’hébergement tout aussi classique, et les adeptes de l’authentique qui recherchent des activités et des hébergements plus régionaux et différents.

Si ces deux offres sont mélangées, l’efficacité et la visibilité de chacune seront amoindries.

Un partenariat Public/ Privé inéluctable

Autre proposition exprimée dans cette consultation : la synergie entre les acteurs privés et publics qui est, d’après la majorité des participants, pratiquement inexistante, et représente le frein majeur du développement touristique.

C’est là le coeur du problème du tourisme d’accueil, et si ces Assises ne devaient aboutir que sur une seule mesure, ce serait de mettre fin à un tourisme exclusivement institutionnel pour lui donner enfin une dimension commerciale.

Aucune industrie ne peut évoluer sous le joug d’une seule entité administrative aussi dynamique aussi créative aussi volontaire soit elle.

En revanche, l’industrie touristique diffère des autres activités économiques, car elle n’est pas propriétaire de ses matières premières composées de sites culturels ou écologiques, de monuments, de musées dont l’entretien et la promotion sont sous la responsabilité de l’Etat ou des Collectivités Locales .

C’est pour cette raison que pour faire face au défi qui se présente à tous, cette synergie est inéluctable entre privé: bras commercial, et public : gestionnaire des patrimoines.

Cette répartition de charges sera génératrice d’économie pour les collectivités même si des aides au secteur privé permettant une accélération de ce modèle seront nécessaires.

La mise en place de ces partenariats sera la clé de la réussite et de l’efficacité de ces Assises car elle prouvera que le tourisme français a enfin accepté le contexte concurrentiel international dans lequel il se trouve.

Dorénavant, les évolutions ne pourront s’évaluer qu’en terme de conquête de parts de marché sur les autres destinations.

L’investissement, moteur du développement

Autre priorité dégagée par cette consultation : l’investissement pour la rénovation et la montée en gamme du parc hôtelier.

Cette mesure est plus qu’urgente si nous voulons retrouver pour la France une place qualitative parmi les destinations internationales.

La problématique de l’investissement se pose d’ailleurs de manière plus large au niveau des infrastructures touristiques.

L’hôtellerie est en priorité concernée par cette nécessaire évolution mais les transports doivent aussi faire l’objet d’innovation notamment en mettant fin à cette première aberration qui est la liaison Roissy /Paris.

Actuellement, en dehors des cars privés Air France et les taxis, il n’existe aucun transport public direct entre les aérogares et la capitale .

Le RER B, bien qu’il reflète la vie quotidienne des français et qui est bien plus confortable que certains transports en commun d’autres pays, a le désavantage de n’être pas direct et dessert des stations qui peuvent étonner des « primos » touristes.

Autre innovation : elle concerne les grands programmes touristiques.

En effet, le dernier grand programme touristique réalisé sur le sol français est le parc hôtelier et d’attraction de Disneyland, à l’époque Euro Disney, qui a ouvert ses portes en Mars 1992, il y a 22 ans.

Ces grands programmes sont des locomotives pour une région et un pays. Sans eux, le tourisme semble ne pas se renouveler.

Souvent les projets concernant ces programmes se heurtent à des freins administratifs composés de directives, de décrets provenant de différents ministères et constituant une véritable jungle insurmontable pour les investisseurs potentiels.

Les autres pistes d’amélioration

D’autres priorités ont été exprimées par les participants de cette opération en ligne comme :

• La formation,
• L’apprentissage systématique de langues étrangères,
• La coordination des différentes strates administratives du pays,
• Le développement des nouvelles technologies pour rendre les offres de la marque France plus visibles et plus accessibles.

Et les clients ?

Cette consultation a posé les bonnes questions, les participants ont donné les bonnes réponses.

Pour que ces Assises réussissent, les mesures qui seront prises par Sylvia Pinel devront être à la hauteur des espoirs qu’elles ont suscités.

L’analyse de la consultation en ligne sur les marchés étrangers va être tout autant intéressante car ce sont essentiellement des clients internationaux avérés ou potentiels qui se sont exprimés et cet individu mal identifié qui est le client pour les acteurs du Tourisme Français n’a pas vraiment été jusqu’à présent au coeur des débats de ces Assises.

Christian Orofino